Le naufrage de la Chiraquie vu de l'étranger :
La presse européenne commente les dernières révélations sur l'affaire Clearstream, selon lesquelles le président de la République et son premier ministre sont personnellement impliqués dans les manipulations visant leur rival Nicolas Sarkozy.
Source : Courrier International.
"Jacques Chirac et Dominique de Villepin ont demandé au général Rondot d'enquêter sur le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy", note la Frankfurter Rundschau en résumant les nouvelles révélations parues dans le quotidien français Le Monde.
Dans cette affaire d'État, observe le journal allemand, les Français se demandent "comment, au juste, on peut continuer avec un président et un chef du gouvernement qui ont utilisé les services secrets de l'État afin de calomnier un ennemi personnel dans la lutte pour le leadership au sein du camp de la droite".
"Et pendant combien de temps", poursuit l'éditorialiste d'outre-Rhin, "Nicolas Sarkozy va-t-il continuer à jouer les victimes tout en représentant l'État aux côtés de Chirac et Villepin ?"
Certes, "le fait que des dirigeants politiques instrumentalisent les services de l'Etat à des fins personnelles constitue malheureusement une tradition de la Ve République", ajoute le quotidien, en rappelant certaines affaires de l'ère Mitterrand. "Mais jamais encore on ne s'était espionné de cette façon entre amis politiques ou entre ministres du même gouvernement. Il s'agit là d'une première qui ne fera que renforcer la méfiance des gens envers l'Etat."
"Oublions, pendant une seconde, 'Sarkozyznogoud' qui, à force de se vouloir calife à la place du calife, ne sera peut-être pas calife du tout", propose La Tribune de Genève.
"Examinons le cas Chirac, à l'effrayant diagnostic. Qu'espère donc un président ayant perdu toute prise sur le réel? Un président que tout le monde raille, y compris les siens. Qui fait perdre à son pays tout le crédit qui lui restait. Qui subit crise sur crise: aux flambées des banlieues ont succédé, sans la moindre pause, les manifs anti-CPE et l'affaire Clearstream."
"Chaque fois, l'extrême droite marque des points", poursuit l'éditorialiste suisse. "Dans les intentions de vote, Le Pen atteint un score encore plus élevé que celui qui était le sien avant sa présence au second tour de l'élection présidentielle de 2002.
Un chef d'État normalement constitué pourrait se dire : 'Si je démissionne maintenant, Le Pen n'aura pas le temps de s'organiser de façon efficace. Et puis, en plaçant les intérêts de la nation avant les miens, je partirai au moins sur une bonne impression.' Hélas, la 'cratopathie' (tiré du grec 'kratos', pouvoir, et 'pathos', maladie) de Chirac résiste à toutes les thérapies.
Céder le pouvoir maintenant serait offrir un boulevard à l'ennemi Sarkozy. La blessure à l'ego présidentiel serait trop douloureuse.
Et peu importe si le prochain incendie permettra à Le Pen de retirer les marrons du feu."