Depuis ma garde chat je vous surveille quand même et je vous livre tout chaud une nouvelle qui m'a bien plu :
En Grande-Bretagne, on en a assez, des incivilités. Pas seulement des actes de vandalisme caractérisés. Mais de ces petits désordres ou actes agressifs, ayant un caractère public, qui, sans être crimes ou délits, défont d'ancestrales bonnes manières : jeter des papiers ou des mégots par terre, cracher, faire du bruit, etc.
Un système de caméras "parlantes", déjà testées dans le nord-est de l'Angleterre, sera donc généralisé à une vingtaine de villes et deux quartiers londoniens : "Hé, vous ! Oui, vous ! Ramassez ce que vous venez de jeter sur le trottoir !"
Les passants épiés par les centres de contrôle seront même parfois réprimandés par des voix enfantines sélectionnées, puisqu'il est prévu d'organiser des concours dans les écoles pour cela.
Inutile de dire les réactions que suscite ce dernier Big Brother dans un pays déjà si bien vidéosurveillé (une caméra installée pour 15 habitants). Mais le ministre britannique de l'intérieur a justifié : "Les communautés locales en ont assez des saletés et des incivilités, elles veulent que l'on rappelle aux gens quel comportement est acceptable et quel comportement ne l'est pas."
Il n'y a pas qu'en Grande-Bretagne que cette montée des incivilités agace. On en parle de manière récurrente en France, en Belgique ou en Suisse. Elle touche tous les espaces publics : hôpitaux, agences pour l'emploi, écoles (où elle nourrit la thématique sur la violence), transports en commun...
Ainsi, constatant l'an passé sur Internet une nette augmentation des prises de parole de clients et d'agents de la Régie autour du manque de respect dans les transports parisiens, la RATP avait lancé à la fin 2006 une campagne (voir
www.objectif-respect.org) pour lutter contre le phénomène : conversations de téléphones portables envahissantes, crincrins des écouteurs de baladeurs importunant le voisinage, voyageurs restant assis sur les strapontins aux heures de pointe ou omettant de céder leur place aux personnes âgées et aux femmes enceintes...
Sans compter les "classiques" dégradations de matériel, insultes à agent ou non-validations du titre de transport. Sur un thème approchant, le 5 avril, l'Association française de prévention des comportements au volant (AFPC) organisait de son côté sa 8e Journée nationale de la courtoisie au volant et sur la route.
Dans Tolérance zéro, incivilités et insécurité (Odile Jacob, 2002), Sebastian Roché, directeur de recherches au CNRS, décrivait la façon dont le phénomène joue dans la détérioration de l'ambiance et du sentiment de sécurité. Sans réponse, des incivilités qui se multiplient pèseraient non seulement sur la confiance dans les institutions, mais aussi, au bout du compte, sur la fréquence des actes délictueux.
Quelles en peuvent être leur source ? Deux explications, généralement, s'opposent : soit un déficit de répression (la société serait minée par un manque de règles), soit un défaut de socialisation (la société ne saurait plus créer du vivre-ensemble).
Osons en ajouter une troisième, qui tient à la nature même de nos siècles de communication. Les nouvelles technologies aidant, l'individu se sentirait de moins en moins contraint par son environnement immédiat et obligé. Il peut être là physiquement, mais, connecté au monde, à ses réseaux, à ses tribus, il peut en un clic, en une touche tactile, décider de ne plus être là. Là où jadis il ne pouvait échapper à son contexte, son territoire, son entourage, où il devait nécessairement composer avec le réel (toute une base pour son éducation), avec la frustration, l'individu peut désormais fuir, s'abstraire des contraintes, s'échapper dans les territoires infinis du virtuel ou, surtout, choisir ses interlocuteurs (combien de conversations par mail, forum ou messagerie instantanée interrompues abruptement et "bloquées" sans appel ?).
L'individu en gagnerait comme un sentiment de toute-puissance.
Celle-ci n'a jamais porté à la civilité.
héhé jemrobe